Page:Dostoïevski - Le Bouffon (paru dans l'Almanach illustré), 1848.djvu/5

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mieux que personne, criait-il. Permettez-moi de raconter une histoire extraordinaire !…

– Racontez, racontez, Osip Mihaïlovitch !

– Écoutez, alors. Je commence, Messieurs. C’est une histoire bien extraordinaire…

– Tant mieux, tant mieux !

– Une histoire humoristique…

– Très bien ! Parfaitement ! Au fait !

– C’est un épisode de la vie de votre humble serviteur…

– Pourquoi, alors, dites-vous que c’est une histoire humoristique ?

– Et un peu tragique, par-dessus le marché.

– Ah !…

– Bref, c’est à cette histoire que vous devez la chance inestimable de m’entendre aujourd’hui. Oui, c’est bien à cause d’elle que je me trouve aujourd’hui dans votre si intéressante société.

– Sans calembours !

– Cette histoire…

– Enfin, cette histoire – terminez, je vous prie, au plus vite votre prologue – cette histoire coûtera sans doute quelque chose, insinua un monsieur blond et jeune. Et, mettant la main à sa poche, il en sortit son porte-monnaie, tout en faisant mine de chercher son mouchoir.

– Cette histoire, mes petits Messieurs, empêcha la réussite de mon mariage…

– Mariage !… une épouse !… Polzounkov voulait se marier !…

– J’avoue que je serais bien aise de voir Mme Polzounkov.

– Permettez-moi de vous demander quel était le nom de celle qui aurait pu devenir Mme Polzounkov, piaffa un jeune homme qui cherchait à se rapprocher du conteur.

– Donc, Messieurs, voici le premier chapitre de mon histoire. C’était il y a six ans de cela, au printemps, le 31 mars, retenez la date, la veille…

– Du premier avril, cria un petit monsieur frisé.