vers. Je décidai que j’avais fait une « boulette » : si quelqu’un n’a pas besoin de quelque chose, c’est éminemment de cela.
— Bah ! me dis-je. Perdre sur la première carte est toujours de bon augure.
Et, ma foi, j’étais très gai.
— Diable ! j’arrive trop tard ! C’est vous qui l’avez acheté ? Pour combien ?
— Deux roubles cinq kopeks, répondis-je au monsieur à confortable pardessus bleu barbeau qui m’interrogeait d’une voix essoufflée.
— Ah! quel dommage !... Et vous le céderiez ?
— Sortons, murmurai-je.
Nous allâmes sur le palier.
— Je vous le céderai pour dix roubles, dis-je en frissonnant.
— Dix roubles! Permettez...
— Comme il vous plaira.
Il me regardait les yeux grand ouverts. J’étais bien mis, je n’avais pas du tout l’allure d’un brocanteur.
— Mais c’est un vieil album sans aucune valeur. A quoi peut-il vous être bon ? L’écrin est détérioré... Vous ne vendrez ça à personne.
— Mais si... puisque vous voulez me l’acheter.
— Mais moi, c’est pour une raison toute personnelle...
— Alors je devrais vous en demander vingt-cinq roubles ; comme je courrais risque de vous voir filer, je me contenterai de dix roubles, mais pas un kopek de moins.
Sur quoi, je tournai les talons.
— Prenez donc quatre roubles, me dit-il en me rattrapant dans la cour. Non ? Eh bien, cinq.
Je continuai mon chemin.