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les apprentis de l’armurier

Et regardant fixement Hartwelt :

— Grâce à toi, comme tu le dis, je n’ai plus ni père, ni mari, ni frère, ni sœur ; mais es-tu bien sûr que je n’ai plus de neveu ?

— Quel soupçon avez-vous là, madame ! Je vous ai dit…

— Tu m’as dit ! tu m’as dit ! Par saint Georges ! tu ne te vanterais pas d’une maladresse, et, si tu l’avais laissée échapper !… Ne proteste pas, c’est inutile ; mieux vaut avouer ta sottise et la réparer…

— Mon Dieu, madame, il se peut…, répondit Hartwelt, embarrassé par le regard scrutateur de sa maîtresse. Cependant mes précautions étaient bien prises, et il faudrait qu’un hasard malencontreux…

— J’en étais sûre ! Mes pressentiments ne m’ont jamais trompée…

— Oh ! si ce n’est qu’un pressentiment !…

— Non pas. Dernièrement, j’admirais à la ceinture d’un seigneur provençal un poignard, plus merveilleusement travaillé que s’il sortait de l’atelier de maître Randaël lui-même, qui tout à l’heure avait la langue si bien pendue, et qui passe pour le premier armurier du royaume. Je lui demandais si cet ouvrage remarquable était de son pays : « Point, madame, me répondit-il : j’ai acheté cet arme en Provence, chez l’armurier de notre sire comte, mais je dois avouer, à la louange de vos sujets, que le ciseleur est Flamand. Je demandai des détails et j’appris l’existence, à Aix, d’une vieille femme et de ses deux petits-fils, dont le signalement et l’âge concordent parfaitement avec ceux de la nourrice de Marguerite et des enfants.

— C’est une coïncidence…

— C’est possible, mais elle me trouble et m’inquiète. Si