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et le plus jeune, qui était le plus pauvre, avait l’habitude de passer deux soirs au moins chaque semaine à Walcot Old Place. Sir Henry l’accueillit la main tendue.

— Vous vous êtes levé tôt, ce matin, lui dit-il. Quel vent vous amène ? Si vous allez à Lewes, je vous accompagne.

Mais le jeune homme avait une contenance embarrassée, sa physionomie était maussade. Il eut l’air de ne pas voir la main qui s’offrait à lui. Debout, tirant sa longue moustache, il regardait le magistrat d’un œil où la curiosité se mêlait d’inquiétude.

— Me trompé-je ? Vous paraissez, tout ému, lui dit sir Henry.

Il ne répondit pas. Évidemment, il était venu provoquer un entretien qu’il ne savait comment engager. Sir Henry se sentit perdre patience.

— Qu’est-ce qui a bien pu vous faire sortir de votre assiette ? À qui ou à quoi en avez-vous ?

— À quelqu’un, dit enfin Ronald Barker avec force.

— Et ce quelqu’un ?

— C’est vous.

Un sourire s’ébaucha sur les lèvres de sir Henry.

— Mon cher garçon, asseyez-vous, fit-il ; et, si vous avez un grief contre moi, parlez, je vous écoute.

Barker s’assit. Il sembla prendre son courage à deux mains avant de lâcher ce qu’il avait à dire. Enfin la question qu’il retenait lui échappa comme une balle :

— Pourquoi m’avez-vous détroussé la nuit dernière ?

Sir Henry avait des nerfs d’acier. Il ne marqua point de surprise ni d’irritation, aucun muscle de son visage ne tressaillit.