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LETTRES D’UN INNOCENT

Décidément, ma chère adorée, les femmes sont supérieures à nous ; parmi elles, tu es une des plus belles et des plus nobles figures que je connaisse.

Je t’aimais profondément, tu le sais ; aujourd’hui je fais plus, je t’admire et te vénère. Tu es une sainte, tu es une noble femme. Je suis fier de toi et essaierai d’être digne de toi.

Oui, ce serait une lâcheté que de déserter la vie ; ce serait mon nom, celui de mes chers enfants souillé et avili à jamais. Je le sens aujourd’hui ; mais, que veux-tu, le coup était trop cruel et mon courage avait sombré ; c’est toi qui l’as relevé.

Ton âme fait tressaillir la mienne.

Donc, nous appuyant l’un sur l’autre, fiers de nous, avec notre volonté, nous arriverons à réhabiliter notre nom ; nous réhabiliterons notre honneur, qui n’a jamais failli.

Je t’embrasse comme je t’aime,

Alfred.
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Jeudi, onze heures du soir.

J’espérais presque recevoir encore un mot de toi ce soir. Si tu savais avec quel bonheur je reçois tes lettres, avec quelle ivresse je les lis et les relis toute la journée !

Bonsoir, bonne nuit, ma chérie.

Nous vivrons encore l’un pour l’autre.

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