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CHAPITRE II

impressions de guerre d’un soldat de seize ans.


Oui, mes enfants ! c’était bien Georges Cardignac en personne ; c’était bien le fils du colonel tué à Saint-Privat ; c’était bien le petit-fils de Jean Tapin, que Paul Cousturier soutenait dans ses bras, le soir du 30 octobre 1870. au coin de la rue Saumaise ; et si j’ai ajouté que Georges était « l’ami » de Paul, c’est tout simplement parce que c’est la vérité.

Vous n’avez pas oublié, mes enfants, que Pierre Bertigny avait été élevé au Prytanée militaire de la Flèche, et je vois — rien qu’au sourire qui vient effleurer vos lèvres — que vous vous souvenez des méfaits qu’il y commit. Je suis même persuadé que l’aventure de la cane, enfermée dans la bibliothèque, est toujours présente à votre mémoire, et que, par conséquent, vous vous rappelez fort bien qu’un bon camarade de Pierre Bertigny, l’élève Cousturier, reçut ce jour-là, de la part du dit Pierre, un œuf de la pauvre cane en plein dans le dos, ce qui, du reste, dessina sur le bleu de sa veste un magnifique soleil d’or que lui eût envié, au temps de Louis XIII, un mousquetaire du Roy.

Eh bien, mes enfants, ce Cousturier d’alors n’est autre que le père du mauvais garnement si redouté de la pauvre Jeannette ! Seulement, pendant que Pierre Bertigny s’engageait dans les cuirassiers, le futur père de Paul avait poursuivi ses études, puis était entré à l’École de Médecine militaire de Strasbourg. Il s’était donc retrouvé, par la suite, en contact direct avec son ancien camarade « Brution » dans les différents régiments où passa Bertigny.