Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/107

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— Nous tombons, sir James… La soupape est restée ouverte, vous entendez bien…

Quant au savant, il semblait comme rivé à son banc, une main sur le plateau horizontal de son instrument, et le terrible froid, qui figeait toutes les volontés, rendait plus tragiques les attitudes et les tentatives de mouvements, car, au lieu de s’agiter, comme ils l’eussent fait dans une température leur laissant la liberté de leurs membres, tous les passagers semblaient frappés d’un commencement de paralysie.

— 1.000 mètres !… Nous tombons !…

L’officier du génie répète les deux mots fatidiques d’une voix blanche, les oreilles tendues vers ce grondement qui vient d’en haut et que le bruit du moteur n’empêche pas de discerner, car c’est un bruit très particulier, et à cette heure, c’est le soupir d’agonie de l’aérostat.

Déjà, l’air venant d’en bas se fait sentir.

D’ailleurs, le baromètre est là qui parle ; son aiguille sautille de 750 à 700… Tout à l’heure on était à 1.900 !…

Dans ces instants tragiques, dont la durée échappe à l’entendement, le Patrie a baissé de 1.000 mètres, et, suivant les lois d’accélération de la pesanteur, il descend toujours plus vite…

Christiane, silencieuse, est venue se serrer contre son fiancé.