Elle s’arracha la première à l’extase qui les envahissait.
— Cette heure est douce, dit-elle, et si Dieu nous ramène, je m’en souviendrai plus tard comme d’une des meilleures de ma vie ; mais nous n’avons pas le droit de la prolonger. Il faut vous remettre à ce travail de nacelle, Georges ; je vous fais perdre des minutes précieuses… Avez-vous quelque espoir ? Dites-moi la vérité.
Il secoua lentement la tête, et, montrant le baromètre :
Tout dépendra de la direction du vent qui va nous emporter.
— Vous prévoyez un coup de vent ?
— Le baromètre a baissé depuis une heure de 18 millimètres. Il baisse encore. Cette dépression ne peut indiquer qu’un ouragan ; mais de quel côté vient-il, je ne saurais le dire. Si, par malheur, il arrive du Spitzberg, nous risquons d’abord d’être brisés contre cette paroi de glace, si nous ne nous sommes pas enlevés à temps, ensuite d’être entraînés vers les régions les plus désertes, vers la Nouvelle-Sibérie ou les îles inhabitées de l’Amérique du Nord.
— Mais alors, c’est folie de causer comme nous le faisons… Ou bien, n’est-ce pas plutôt que vous jugez impossible de changer cette nacelle contre celle d’Andrée ?
— Vous avez touché juste, Christiane, vous me voyez inactif parce qu’il n’y a rien à faire : espérer,