— Oui : organisées à Mecheria, à Géryville et à Laghouat, elles doivent converger vers El-Abiod Sidi-Cheik, où des rassemblements plus nombreux autour du tombeau de ce saint semblent indiquer un objectif particulier pour les masses qui arrivent du Touat.
— il serait peut-être à désirer qu’elles n’opérassent pas isolément.
— C’est bien mon avis, mais il m’a fallu emprunter aux trois départements pour réunir une force suffisante ; vingt-deux mille hommes sont en route.
— De troupes françaises ?
— Exclusivement françaises : on ne trouverait pas dans toute l’Algérie, même en doublant les primes d’engagement, de quoi reformer un bataillon de tirailleurs : c’est ce qui m’inquiète dans ce soulèvement en me donnant sa note particulière, l’unanimité.
— Vous êtes en relation directe avec ces colonnes ?
— Oui ; celles de Mecheria et de Géryville, une douzaine de mille hommes environ, ont dû atteindre El-Abiod ce matin après une marche de nuit, et la troisième, forte de 10.000 hommes, est à Brézina, à une quarantaine de kilomètres dans l’Est.
— Alors la jonction aura lieu dans deux jours, demain peut-être, et 22.000 Français, munis d’armes perfectionnées, ne peuvent manquer de remporter une éclatante victoire : ce sera le salut de l’Algérie.
— Non, au point où en sont les choses, une seule victoire ne suffira pas ; nous n’aurons que le temps ensuite de faire face aux masses qui arrivent du Sud-Est et qui, dans quelques jours, atteindront Tuggourth. Nos espions prétendent qu’elles ont pour avant-garde une masse importante exclusivement composée de Touaregs.
— Dangereux ennemis, cruels surtout ; que pourrez-vous leur opposer ?
— Les troupes de Tunisie et tout ce qui reste disponible dans la province de Constantine : la concentration s’opère à Biskra et Tébessa.
— Mais comment se fait-il, interrogea l’ingénieur, que ce soulèvement ne vous ait pas été annoncé longtemps à l’avance !