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leurs envoyé par la France à In-Salah et dans les oasis du Touat, pour renforcer le cinquième.

Ce n’était pas d’ailleurs dans un pays de nouveaux convertis qu’opérait le sultan, il était là en plein milieu musulman : depuis la cinquième année de l’hégire, la civilisation arabe avait pénétré dans toute cette contrée et y avait même atteint un degré extraordinaire.

Les villes de Kano, Sokoto, Katchena, Yacoba, Gombé et tant d’autres y avaient compté parmi les plus florissantes de l’Afrique.

Mais les luttes intestines avaient porté un coup mortel à ce développement comparable à celui qu’avait atteint l’Asie sous les khalifes ; cependant l’appel du sultan y avait été entendu et les chefs arabes s’étaient montrés d’autant plus décidés à seconder ses projets que leur principale source de bénéfices, l’esclavage, venait d’être tarie : les payens avaient complètement disparu de la région du Baghirmi et de l’Adamaoua qui fournissait jusqu’à vingt mille esclaves par an.

Ils n’avaient donc plus qu’à se rejeter sur les infidèles du Nord pour essayer de retrouver la prospérité d’autrefois.

Pendant les trois jours que durèrent les audiences données par le sultan à Kouka et les conférences secrètes qu’il eut avec les chefs, les types les plus curieux et les plus étranges se trouvèrent réunis dans cette capitale.

On pouvait y voir, s’y coudoyant : l’Arabe olivâtre, le Kanouri à la peau foncée, aux narines flottantes ; le Foullane aux traits fins, à la taille souple, aux membres délicats ; l’Oulad-Sliman, le voleur par excellence au profil bestial et féroce ; le Mandingue à la figure aplatie ; la Virago de Noupé et la jolie négresse du Haoussa, élégante et bien faite.

Mao, en maître absolu qu’il était, profita de ce rassemblement pour augmenter son harem et le doter de nouveaux types féminins.

Un soir qu’il avait obtenu d’un cheik des Zaberma une jeune négresse d’une douzaine d’années, dont la peau d’un brun rouge et le nez fortement épaté lui avaient paru absolument séduisant, il prit à part le fils du sultan.

— Crois-tu, lui demanda-t-il, toi qui as été en Europe,