Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/78

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ou tireurs espagnols, bientôt coupée définitivement de la mère patrie par la distance, s’était fixée dans le pays et avait contracté des mariages avec les femmes indigènes, formant ainsi un noyau curieux d’origine européenne dans cette ville qui, pendant plusieurs centaines d’années, allait éloigner de ses murs tout ce qui portait un nom européen.

Après eux, les Mossis, « les maîtres de l’arc et de l’épée », avaient emporté la vieille cité, et comme si la nature eût voulu aider à son déclin, le Niger changeant de cours s’était retiré d’elle, la laissant isolée à 14 kilomètres de ses nouvelles rives et l’obligeant à avoir un port, Kabara, sur la grande artère africaine.

Alors la décadence était venue : aux Mossis avaient succédé les Foulas, supplantés à leur tour par les Toucouleurs. et Tambouctou, renonçant à se défendre, avait laissé tomber en ruines les puissants remparts qui en avaient fait, pendant deux cents ans, l’une des premières places fortes du monde musulman.

Puis, les Touaregs avaient chassé les Toucouleurs et avaient imposé leur hautaine domination à ce peuple façonné à la servitude. Mais ils ne s’étaient pas, comme leurs prédécesseurs, installés dans la ville conquise.

Ils ne voulaient pas, pour ces palais en ruines, renoncer à leurs tentes de peau, à leur vie libre à travers le Sahara.

Chaque année ils y entraient en maîtres, y percevaient le tribut et repartaient silencieux comme ils étaient entrés.

Pendant plus d’un siècle, ils en avaient écarté les voyageurs avec une telle rudesse, qu’avant l’arrivée des Français, on citait comme des héros les explorateurs qui y étaient entrés.

Ces derniers étaient d’ailleurs assez rares pour mériter ce titre.

En 1826, Laing, le premier, avait atteint Tambouctou par la Tripolitaine et le Touat ; mais il avait été massacré au début de son voyage de retour.

Un Français, René Caillé, y avait séjourné en 1828, et le premier en avait rapporté une description et un plan en Europe.

Vingt-cinq ans après, Barth y était arrive à son tour, envoyé