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Page:Driant - L’invasion noire 3-fin de l’islam devant Paris,1913.djvu/71

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Un violent combat semblait se livrer dans l’âme d’Abd-ul-M’hamed.

Qui allait l’emporter en lui du Sultan, de l’époux outragé, ou de l’homme qui avait jadis aimé la sultane Hézia ?

Son regard se porta vers la trappe refermée tout au bord, une mare de sang jetait, sous la lueur des lampes, un reflet écarlate.

Alors sa voix s’éleva, grave et tranchante, dans le silence du souterrain.

— Omar, dit-il, j’avais en toi une confiance aussi grande qu’en moi-même. Tu viens de violer mon autorité, celle que Mahomet déclare la plus sainte après celle de Dieu. Le serment que j’avais fait sur le Coran, tu l’as rendu vain, et Dieu m’en demandera compte. Je te maudis !…

— Mon père ! s’écria Omar, accablé sous ce poids inattendu…

— Je te maudis ! répéta le Sultan, étendant les bras, et au jour de la résurrection la pierre de ton tombeau retombera sur toi pour t’écraser !…

Il allait disparaître par où il était venu, il se retourna, montrant la porte qui conduisait à la mer.

— Pars avec eux, dit-il méprisant, pars, tu as dans le sang leurs faiblesses et leurs lâchetés. Tu n’es plus mon fils, car tu m’as bravé. Pars, te dis-je !…

— Non, fit Omar simplement.

— Que veux-tu faire maintenant ici ? Tu n’es plus mon fils, tu n’es plus rien pour moi…

— Tu ne peux m’empêcher d’être un guerrier musulman, simple soldat dans ton armée…

— Que mes yeux ne te voient plus… Sois maudit !…

Omar ne répondit rien, et lorsqu’il eut disparu, le suivit à pas lents.

Ce n’était ni le sectaire, ni l’époux outragé qui venait de parler c’était le père dont l’autorité avait été méconnue et bravée.

Dans le monde musulman, les droits paternels sont sacrés ; ceux du Commandeur des Croyants, en particulier, n’ont pas de limites, et Abd-ul-M’hamed en était si profondément convaincu, lui qui détenait sur des millions d’hommes la puissance suprême, qu’il ne pouvait pardonner l’atteinte qui venait de leur être portée.