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Page:Drieu la Rochelle - Le Feu Follet (1931).pdf/134

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Tout cela était simple et solide, et faisait entrevoir à Alain à chaque visite quelque chose dont l’avait à jamais privé son caractère ou son milieu, le parti d’accepter la vie de façon ferme et franche.

Devant cette façade, Alain s’arrêta un moment. Il n’était pas ivre, il n’avait bu que trois whiskys. Il n’avait pas tellement envie de se repiquer : la seule présence de la drogue, même en dose infime, lui suffisait. Il se félicita de se présenter dans une tenue décente chez les Lavaux, chez qui régnait une harmonie qui lui en imposait.

Il entra dans le salon : à travers un groupe qui se serrait autour de Solange Lavaux, il l’atteignit.

Elle tendit la main à Alain avec ce sourire de gratitude qu’elle offrait à tous les hommes, car tous la désiraient et la chérissaient. Dans cette génération, on n’aura pas vu une autre beauté aussi parfaite, aussi familière. Elle était courtoise comme une princesse à qui les parvenus n’ont pas encore appris la morgue.

Une voix chaude résonna. Le grand Cyrille Lavaux, si droit, si mince, tendait la main à Alain. Sa laideur était aussi séduisante que la beauté de sa femme. Il l’entourait d’un amour si sain, si net, si gai qu’elle en paraissait encore une créature plus réussie.

Lavaux promena doucement Alain parmi ses autres amis. Il y avait trois hommes et trois