Page:Drouot – Eurydice deux fois perdue, 1921.djvu/24

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change de place ; je dispose autrement les plis des rideaux ; je secoue le feu, j’en tire un brandon, et, debout, je le regarde se consumer avec une rapidité terrible.

Il y a cet objet que je déplace toutes les fois : un siège que j’écarte du mur ; je repousse du pied ce coussin à droite (ô honte, ô misère, chaque fois !)

Mon manteau, en travers de la table ; ici, mon chapeau ; là une fleur, toujours violette. J’ai prévu cet ordre bizarre. Je me hâte, je me précipite, comme un homme qui s’habille vite, le matin, pour aller mourir.

Toutes les deux minutes, je sors ma montre ; je ne lis pas, sur le cadran, le chiffre que j’y regarde ; je ne le lis pas ; il prend de lui-même une voix pour me plaindre. « Il est huit heures ; huit heures dix ; le quart. » Soudain je perds conscience : je suis cet écolier qui dévorait, à l’étude du soir, les récits des plus rudes batailles.