Page:Drumont - La France juive, tome premier, 3eme édition, 1886.djvu/226

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mais il ne raconte pas d’histoires, il ne dit pas aux fils que leurs pères étaient d’affreuses canailles ou des serfs abjects, il ne les invite pas à brûler leurs monuments, il ne fait là ni emprunt frauduleux, ni Commune ; il est heureux, et les autres aussi.

Cette petite Hollande, industrieuse et commerçante, étrangère elle-même à cet idéal chevaleresque qui est si antipathique aux fils de Jacob, fut vraiment le berceau du Juif moderne. Pour la première fois Israël connut là, non point le succès éclatant qui grise le Juif et qui le perd, mais le calme de longue durée, la vie régulière et normale[1].

C’est Rembrandt qu’il faut, je ne dis pas regarder mais contempler, étudier, scruter, fouiller, analyser si l’on veut bien voir le Juif.

Elève d’Isaackson van Schanenberg et de Jacob Pinas, locataire d’abord puis propriétaire de cette maison de la Joden Breestraet (rue des Juifs), dans laquelle il peignit ses chefs-d’œuvre, Rembrandt vécut constamment avec Israël. Son atelier même, encombré d’objets d’art, véritable capharnaüm d’étoffes et de bibelots, ressemble à ces boutiques de brocanteurs au fond desquelles l’œil un moment désorienté finit par distinguer un vieillard sordide au nez crochu. Son

  1. Une réaction cependant, semble être en train de se produire là encore, car les Juifs finiront par exaspérer les gens les plus paisibles. A Amsterdam, au mois d’octobre 1884, nous racontent les Archives israélites, le propriétaire du premier café de la ville refuse l’accès de son établissement aux Juifs, en s’excusant sur les répugnances de sa clientèle. Un des expulsés, M A. C. Wertheim, chevalier de la Légion d’honneur et officier d’Académie, naturellement puisqu’il est Juif et étranger, protesta violemment, mais le propriétaire défendit son droit, et il fut chaleureusement félicité par tout le monde.