Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/272

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cela, sous un ciel gris, on lit le mot : « Ichaboë » (Ile de la cote occidentale d’Afrique, fameuse par son guano).

La ville, où la vie jadis était si débordante, où les pavés eux-mêmes riaient aux passants, donne un peu la sensation de Munich. Au mélancolique et glacial München, il manque de la gloire, du mouvement pour remplir ce décor de palais, de temples érigés aux grands hommes absents, d’avenues magnifiques. Paris a eu cette gloire, il est plein de souvenirs d’héroïsme et de grâce, de légendes immortelles, de fantômes illustres, mais tout cela semble appartenir à un passé pour toujours aboli. Certaines régions ressemblent à des Pompéï et on se demande quelle catastrophe les a rendues tout à coup silencieuses et désolées. Ailleurs, l’activité est fébrile, mais avec une sorte d’inquiétude sombre qui persiste malgré tout.

Les hôtels du faubourg Saint-Germain gardent leurs volets fermés pendant dix mois de l’année. Presque tous les beaux hôtels du quartier des Champs-Elysées et du quartier Monceaux sont aux Juifs ; parfois, par les fenêtres ouvertes, on entend dans la solitude les échos, de quelque concert, c’est un Juif quelconque qui soigne sa névrose.

Le livre si français, le livre qui fait penser, le livre qui tenait tant de place au XVIIe siècle n’existe plus ; c’est la musique, art tout sensitif, art d’amollis et de maladifs, qui tient le premier rang. Après le crocodile, le Juif est le plus mélomane de tous les animaux. Tous les Juifs sont musiciens ou comédiens d’instinct. Camondo joue du violoncelle. Mme Saly-Stern chante l’opérette comme Judic. Herman Bemberg compose. On voit, dans des programmes satinés, le buste au nez inquiétant de l’auteur des Djinns, se dressant au milieu de branches de laurier au-dessus de bande-