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de conter tour à tour une histoire. Rien n’est plus touchant que le Récit de la Prieure. Il est vraiment d’un charme si profond dans son mysticisme féminin que nous le traduisons presque en entier en nous efforçant de respecter, autant que possible, la naïveté de l’original.


LE RÉCIT DE LA PRIEURE

… Dans une grande cité d’Asie se trouvait, au milieu du peuple chrétien, une Juiverie, protégée par un seigneur du pays, « for foul usure and lucre of felonye, » odieuse au Christ et à sa compagnie. Et l’on pouvait s’en aller à travers ce quartier à cheval et à pied, car il était libre et ouvert aux deux bouts.

Or, à une des extrémités existait une petite école de chrétiens où se trouvaient des enfants, un grand nombre d’enfants issus de sang chrétien, qui apprenaient dans cette école, année par année, les leçons usitées dans ce pays-là, c’est-à-dire à chanter et à lire, comme le font tous les petits enfants dans leur bas âge.

Parmi les enfants était un fils de veuve, un gentil petit clerc de sept ans d’âge, qui chaque jour venait à l’école, et toutes les fois qu’il voyait une image de la Mère du Christ, il avait en usage, comme on lui avait appris, de s’agenouiller et de dire « Ave Maria » comme il passait par le chemin.

Aussi la veuve avait-elle appris à son petit fils à honorer notre bienheureuse Dame, chère Mère du Christ, et il ne l’oubliait jamais ; car les bons enfants simples apprennent cela bien vite ; et vraiment chaque fois que j’y pense, Nicolas me revient à l’esprit, lui qui, si jeune,