retrouve quelque chose qui pend. On croit d’abord, dit le journal juif, que c’est une vieille soutane, mais bientôt on s’aperçoit que dans cette vieille soutane il y a un cadavre[1].
Sans doute le suicide est le crime des crimes puisque c’est le seul dont on ne se puisse repentir ; c’est le crime de Judas. Mais, comme on devine, au point de vue humain, l’affolement qui prend ces humbles quand ils sentent que la meute est sur eux ! A qui avoir recours ? Il y avait fête à Ferrières cette semaine-là ; vous figurez-vous le pauvre curé demandant assistance contre les Juifs de la Lanterne à quelque invité s’élançant joyeux au rendez-vous de chasse ? « Les Juifs, mon cher abbé, mais ce sont des gens ravissants, lisez les gazettes, la baronne a des yeux de velours ; quant
- ↑ Il faut regarder aussi, dans le numéro du 15 novembre de la Police illustrée que
publie hebdomadairement la Lanterne, la Semaine comique par Cool Toc avec ce
sous-titre : le Curé assassin ou la vertu récompensée. On y voit le curé assis devant
une table bien servie en face d’une femme dans une attitude gaillarde, puis Dieu le
père, attirant le curé à lui ; un dessin plus grand représente le curé pendu et tirant la
langue ; aux pieds du mort qui traînent sur le parquet, il y a un exemplaire de la
Lanterne. C’est effectivement fort comique. J’ai deux exemplaires de cette feuille,
qui fait honneur à Eugène Mayer ; j’en tiens un à la disposition de Bedarrides et
autres impudents qui s’émancipent souvent à parler du « pauvre Israël si bon, si
tolérant. »
Notons encore, parmi les imaginations ignobles qui caractérisent, bien une époque, la cavalcade organisée dans le bourg de Saintines, au mois de mars 1884, avec l’autorisation de M. de Selves, préfet de l’Oise. Sur des chars ornés de feuillages, des filles étaient installées. D’autres chars servaient de voitures-réclames à un roman-feuilleton de la République française. Dans une carriole fermée par un rideau qu’on tirait moyennant deux sous on avait placé un bouc et une chienne qui étaient censés représenter le malheureux prêtre et la femme que la calomnie lui attribuait comme maîtresse. Tout ce que les villages de la banlieue de Paris contiennent de gens mal famés suivait à cheval ou à pied, ivres dès le matin, hurlant des refrains qui auraient épouvanté le marquis de Sade.