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Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/567

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Combien j’aime mieux la pensée de ces artistes primitifs qui nous montrent Jésus associé à la vie familière de la cité, apparaissant dans le décor même de la ville natale du peintre, comme pour démontrer, par cette erreur apparente qui n’est que la constatation d’une vérité morale, que le Dieu fait Homme est toujours et partout présent parmi nous ! Je me souviens d’un beau tableau de Philippo Lippi qui figurait, je crois, à la vente Beurnonville : le Christ converse avec ses disciples sur le parvis du Temple et la ville entière se déroule devant lui et devant le spectateur ; les passants s’accostent, se saluent entre eux, les femmes se hâtent en revenant du marché, les barques glissent sur une rivière. Rien n’est oublié et le détail le plus naïvement naturaliste a sa place dans cette œuvre qui mêle l’élément divin à l’élément humain.

Tel le Christ était à Jérusalem, tel il est à Paris. La Passion pour lui se reproduit sans cesse. Qui n’a rêvé, en lisant le récit de cette agonie effroyable, de s’être trouvé sur le passage de Celui qui allait mourir pour nous, de lui épargner une souffrance, d’étancher un peu du sang qui coulait sur ce front déchiré par la couronne dérisoire, d’àdresser tout au moins à la Sainte Victime un regard qui la console ? Chaque jour le Juste monte au Calvaire devant nos yeux et la plupart le regardent passer indifférents, songent à leurs plaisirs, à leurs affaires. Quelques-uns auraient des velléités de protester ; ils n’osent pas, ils craignent de se mettre en évidence, ils se disent : « Je suis tranquille, si je m’avoue chrétien, toute la canaille franc-maçonnique et juive va s’acharner sur moi. »

Heureux qui a surmonté ce premier mouvement de faiblesse ! J’imagine quelle sera sa joie au jour de la Justice quand, devant la face lumineuse du Christ, il se rappellera