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Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/80

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notre époque que de constater quelle vitalité il y a dans cette noblesse, à laquelle il n’a jamais manqué que de croire à elle-même, pour jouer le même rôle qu’en Angleterre.

Cent ans bientôt seront écoulés depuis qu’on a proclamé tous les hommes égaux, qu’on a brûlé solennellement au Champ-de-Mars l’arbre symbolique auquel étaient attachés tous les hochets de la féodalité, les tortils et les couronnes, les écussons et les manteaux de pairs, les parchemins et les généalogies. L’aristocratie actuelle n’a aucune place dans l’organisation contemporaine, elle n’a rien tenté pour en mériter une ; elle contient, en outre, un élément fort considérable de noblesse de cartes de visite, sans compter le nombre incroyable de fils d’acheteurs de biens nationaux qui se sont ennoblis en prenant le nom de la terre que leur grand père avait volée après avoir fait guillotiner le propriétaire légitime.

En réalité, cependant, en dépit de tant de scandales colportés par tous les journaux, l’aristocratie n’a pas complètement perdu tout son prestige dans ce siècle qui se croit si profondément démocratique. Un duc authentique, par ce seul fait qu’il est duc, est quelque chose, il trouve à monnayer son titre, à se marier richement. Cette improvisation fabuleuse d’un petit lieutenant d’artillerie créant des duchés, des comtés, des baronnies, a été prise au sérieux, s’est greffée facilement sur la noblesse ancienne qui s’était constituée comme elle par l’héroïsme militaire. Il y a plus, cette descente de la Courtille héraldique, cette noblesse qu’on a appelée la noblesse de l’almanach de Golgotha, cette invraisemblable éclosion de financiers se déclarant comtes et barons, non pas à la suite de services rendus au pays, mais à la suite de tripotages de Bourse, n’excite déjà plus la gaieté des premiers temps ; on sourit, sans doute, quand