Page:Du Bouvot De Chauvirey - La terre de Chauvirey, 1865.djvu/117

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partager avec d'autres, chance qu'il ne courait pas en prêtant ses capitaux comme il savait le faire. Il expropriait sans pitié la plupart de ses débiteurs ; c'est probablement à ces ignobles moyens qu'il fait audacieusement allusion dans ses nombreux testaments, lorsqu'il s'y vante d'avoir été le créateur de sa fortune « ayant su, dit-il, faire fructifier celle que ma pauvre et bien digne mère a tant peiné pour me conserver. » Ce que c'est pourtant que d'être un fils respectueux ! Un autre aurait dit naïvement : « celle dont ma brave et honorée mère avait spolié son frère, son cousin et son neveu. » Mais, quelque talent qu'il déployât dans son honnête industrie, il ne fut pas toujours à l'abri de quelques légers inconvénients ; c'est ainsi que (sans parler de ceux d'une autre nature) il eut, peu d'années avant sa mort, le désagrément d'être condamné à 13,000 fr. d'amende pour délit habituel d'usure. Cela le rendit plus circonspect, mais non pas plus retenu, et, prenant mieux ses précautions tout en augmentant le taux de ses négociations, il se hâta de récupérer ce dont il avait été obligé de se dessaisir si fort à contre-cœur.

Rien ne saurait excuser sa conduite à l'égard de son père, quelque peu honorable que fût celui-ci. A défaut de respect et d'affection il lui devait du moins protection et assistance, et il lui a refusé jusqu'à une sépulture. Lorsqu'après la mort de Roussel on fit l'inventaire de son mobilier, on découvrit, dans un cabinet attenant à sa chambre à coucher, une caisse remplie d'ossements humains. Chacun se livra tout d'abord à des suppositions que pouvaient rendre vraisemblables les habitudes connues de Roussel ; mais on vérifia bientôt que ces