Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/204

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Cour des plaidoyers communs et celle du Banc du roi ? La jurisprudence française ne connaît point de ces tribunaux, qui, par cette duplicité, mal-assortis à ses lois, ne font non-seulement que compliquer et embarrasser les libres ressorts de sa justice, mais exposent celle-ci à une imminente subordination par le nombre bien raccourci des juges qui y président. En Angleterre, il importe peu à la sûreté des jugements que deux ou trois juges (et même un seul) siègent dans les Cours, parce que ces juges n’y jouent que le personnage de rapporteurs, dont tout l’office se réduit à mettre fidèlement les pièces du procès sous les yeux des jurés, à qui seuls appartient le droit exclusif et inaliénable de former et de prononcer les jugements[1] ; mais en jurisprudence française, où c’est aux juges en personne à décider, trois juges, présidents de ces deux Cours, réduits surtout à l’unité par l’esprit de faction, rien que trois juges ; mais avec ce système, dans le cours ordinaire des passions humaines, la justice doit être vendue à beaux derniers aux sollicitations et aux partis, avant même d’être administrée. Les législateurs français n’ignoraient pas cette marche connue de la per-

  1. Quand l’Angleterre ne resterait redevable au grand Alfred, que de ces jugements par jurés, institution bien éclairée pour des temps qui l’étaient peu, et bien amie de l’innocence, de la simplicité et de la pure nature, cette institution, dis-je, seule, suffirait pour y immortaliser sa mémoire.