Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/351

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dans l’assemblée du 26 novembre 1867, par un des vice-présidents lorsqu’il a dit : « Quelle est notre mission ? Sauver d’abord, partout et toujours, par le dévouement et par l’exemple ! » Ceci n’est pas une vaine parole, c’est un mot d’ordre auquel chaque membre de la Société obéit.

La passion du bien agite invinciblement certains cœurs. Il y a là des héros modestes qu’aucun danger ne fait reculer, qui sont prêts à toute heure et qui ont tous les courages, celui du grand jour et celui de minuit. L’intérêt n’entre pour rien dans le mobile qui les pousse, car un membre de la Société des sauveteurs se croirait déshonoré s’il acceptait la prime offerte par l’administration. Sa seule petite vanité, et elle est plus que légitime, elle est honorable, est dans certains jours de gala de pendre à sa boutonnière trop étroite toutes les médailles qui lui ont été décernées et que son intrépidité lui a values. Il est bon de citer le nom de quelques-uns de ces braves gens, qui ne soupçonnent peut-être pas tout ce que leur existence a de glorieux : Fagret, tailleur, quai d’Orléans, no 6, à la Bibliothèque polonaise, qui, malgré ses soixante-sept ans, a encore arraché à la Seine, il y a peu de temps, un homme qui se noyait ; Metzger, négociant en vins à Bercy ; Lenéru, propriétaire de bains au Pont-Royal ; Cardon, patron de lavoir à l’Arche-Marion ; Henri, maître-baigneur aux bains Henri IV, et enfin Cretté, qui a un bateau à lessive près du pont de Bercy ; celui-là est d’une famille héroïque : ses quatre frères ont été récompensés pour leurs actions d’éclat, et sa vieille mère, âgée de soixante-dix ans, porte la médaille qu’elle a gagnée en opérant elle-même plusieurs sauvetages. Ces braves gens sont connus dans leur quartier ; quand ils passent, on se découvre, et lorsqu’on apprend qu’un malheur est arrivé en Seine, on dit : « Ah ! si un tel avait été là ! »