Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/49

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différents détails d’une si considérable administration, il n’est pas inutile de revenir en arrière pour un instant et de dire quelques mots d’une institution qui a fait grand bruit jadis, qui a inspiré bien des colères, et qui reste justement flétrie par l’opinion publique : je veux parler du cabinet noir. Il prit réellement naissance en même temps que l’administration des postes ; car, ainsi qu’on l’a vu, Louis XI eut soin de spécifier que les courriers royaux ne transporteraient les lettres que si elles avaient été lues préalablement, et si elles ne contenaient rien qui pût porter préjudice à son autorité[1]. C’est là l’origine de cette institution. Il parait hors de doute que les anciens gouvernements y ont eu recours. Concini, Richelieu, Mazarin, Louis XIV, Dubois, qui, parmi tous ses titres, portait celui de « grand maître et surintendant général des courses, postes et relais de France », n’étaient point hommes à s’arrêter devant le cachet d’une lettre fermée ; mais nul document précis n’existe sur lequel on puisse baser une certitude. Cependant M. Pierre Clément donne de curieux détails sur les précautions prises par Fouquet pour être toujours au courant des affaires des autres et éviter qu’on ne se mêlât trop des siennes. Le surintendant des postes, M. de Nouveau, était une de ses créatures et lui communiquait les papiers dont la connaissance pouvait lui être utile. Fouquet savait à quel point la poste était infidèle, car dans les instructions qu’il trace lui-même pour le cas où il serait arrêté, on lit cette recommandation, qui n’a pas besoin de commentaire : « Prendre garde surtout à ne point écrire au-

  1. Dans certaines circonstances, on rappelait publiquement ces prescriptions. « L’an 1523 le vingt-huitième jour de juing fut cryé à son de trompe par les quarrefours de Paris, de par le Roy… qu’on ne laissât plus passer nulz courriers ne aultres personnes portans lettres sans être veües et visitées ; et ce sur peine de confiscation de corps et de biens, et fut ce faict par despit de ce que le pape tenoit le party de l’Empereur. » Journal d’un Bourgeois de Paris sous le règne de François Ier, p. 112 et 113.