Harlay et les sergents de ville de la brigade centrale font la haie tout autour pour mettre bon ordre aux tentatives d’évasion. Les individus arrêtés sont conduits un à un dans un bureau spécial qui fonctionne jour et nuit, et qu’à cause de cela on appelle la permanence. Là on inscrit sur une feuille le nom de l’inculpé, son état civil, la cause de son arrestation, le titre du fonctionnaire qui a libellé l’ordre d’envoi et le nombre de pièces (papiers, objets, etc.) qui sont jointes au procès-verbal. Cette première formalité étant accomplie, chaque individu est mené au dépôt, vaste prison récemment reconstruite et dont les fenêtres s’ouvrent dans le soubassement de la nouvelle façade du Palais de Justice. À son entrée au dépôt et avant nul autre soin, le détenu reçoit un pain, car il est de principe à la préfecture que tout individu auquel on reproche un fait délictueux a pu être amené à le commettre sous l’influence de la misère et de la faim. Là aussi, dans un greffe qui ne chôme guère, on relève les noms et signalements de chaque personne arrêtée ; puis celle-ci est enfermée dans les salles communes, s’il n’y a pas d’inconvénient à la laisser communiquer avec les autres détenus ; dans une cellule, si le secret est nécessaire. Il y a des salles et des préaux sévèrement séparés pour les hommes, les femmes, les filles publiques et les enfants. Le service des hommes est fait par des gardiens, celui des femmes par des sœurs de la congrégation de Marie-Joseph.
C’est là que les inspecteurs de la sûreté viennent chaque matin, dans une petite chambre isolée, interroger un à un les gens accusés de crimes ; c’est là qu’on les frime, c’est-à-dire qu’on les dévisage, qu’on les morgue, ainsi qu’on disait autrefois, afin de voir dès l’abord s’ils ne sont point repris de justice. On essaye d’obtenir d’eux l’aveu du méfait reproché, et, lorsqu’il y a nécessité d’en questionner deux à la fois pour les amener à