Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/317

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Que veut-on obtenir en conviant la foule à ce spectacle hideux ? La terrifier, lui prouver que la loi judaïque du talion existe encore au dix-neuvième siècle chez un peuple pratiquant une religion dont le fondateur a dit à son apôtre : « Remets ton glaive au fourreau ; » lui causer une impression profonde et durable ? Mais elle sait tout cela, cette foule ; il faut bien dire le mot, si pénible qu’il soit, elle vient là pour s’amuser ; on y rit, on y boit, on y chante ; pour un peu on y danserait ; on y a dansé. Un lendemain de mi-carême, plus de deux cents masques ont roulé jusqu’à la place de la barrière Saint-Jacques, sautant et cabriolant autour de l’échafaud sur lequel deux assassins allaient monter. Est-ce l’exemple qu’on poursuit et qu’on veut donner ? L’exemple est nul, pour ne pas dire plus. Le 5 août 1869, Momble, meurtrier d’une femme et d’un enfant, subit sa peine, en public, au grand jour ; tous les journaux racontent ses derniers moments ; le 25 du même mois, Troppmann commence la série de ses forfaits longuement médités. Dans les cinq jours qui ont suivi l’exécution de ce dernier, trois assassinats sont commis à Paris. Dans l’espace restreint de la rue Gerbier et de la rue de la Vacquerie, la foule ne peut rien voir ; elle n’atteint pas son but et la justice manque le sien. Haussés sur la pointe des pieds, gênés par les shakos des soldats, par les tricornes des sergents de ville, par les chevaux de la garde de Paris, par les arbres de la place, cinquante, soixante curieux au plus, réussissent à se rendre à peu près compte de ce qui se passe. Avec le système actuel, on n’arrive qu’à produire sur cette masse illettrée et corrompue une démoralisation qui est coupable, car elle peut être évitée. On redoute, je le

    législatif. Imparfaitement défini, mal présenté, plus mal défendu, dans la séance du 21 juin, il fut retiré avant le vote définitif, qui ne lui eût pas été favorable. (Voir Pièces justificatives, 8.)