Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/316

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vient d’expédier à Alger une guillotine sans escalier, pourquoi n’en pas faire construire une semblable pour Paris[1] ? Tout est trop lent, trop minutieux, trop théâtral, trop pénible, trop inutilement traditionnel. Il n’est pas jusqu’au transport du cadavre qui ne devrait être modifié ; à quoi bon, en effet, traverser tant de quartiers populeux en traînant ces restes lugubres et aller les enfouir à Ivry, quand le cimetière du Père-Lachaise est à la porte du lieu même de l’exécution ? Est-ce pour ne point déshonorer le champ de repos aristocratique de Paris ? Peuh ! les distinctions morales et sociales perdent singulièrement de leur importance dans ces sortes d’endroits-là !

Dans la voie des améliorations touchant à ces choses redoutables, on n’ira jamais assez loin, et les nations voisines nous ont clairement montré la route que l’on doit suivre. En Prusse, dans une partie des États de l’Allemagne, en Angleterre même, où les vieux usages ont une puissance si persistante, les exécutions capitales ont lieu aujourd’hui à huis clos, dans l’intérieur même des prisons, en présence d’un certain nombre de fonctionnaires, d’individus délégués, de mandataires de la presse, représentant la société et affirmant par leur présence cette publicité qui donne la dernière consécration aux œuvres de la justice. C’est là une modification excellente, qu’il faut nous approprier au plus tôt[2].

  1. Grâce à l’initiative bienfaisante de l’impératrice, le trajet sera dorénavant moins pénible, car, à sa recommandation, une porte a été ouverte qui permet au lugubre cortège de se rendre à l’avant-greffe en traversant les ateliers et sans être forcé de gravir les escaliers. La route est encore longue, mais du moins elle sera de plain-pied. De son côté, la préfecture de police s’était, à juste titre, préoccupée des lenteurs de la toilette ; elle désirait introduire dans ces funèbres et inévitables apprêts toutes les modifications que réclame l’humanité, et, au mois de juin 1870, elle avait chargé le chef du service de sûreté d’étudier la question au point de vue pratique, conjointement avec l’exécuteur des arrêts de la justice. (Voir Pièces justificatives, 7.)
  2. Le 25 février 1870, un projet de loi fut déposé, à ce sujet, au Corps