Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/368

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même soir, une erreur fut commise, il y a peu d’années, au détriment de deux pensionnaires d’un théâtre subventionné. Les suites de cette aventure furent déplorables, et la moralité publique en fit tous les frais. Les journaux, affriolés par ce petit scandale, ravis de prendre en faute une administration qui cependant est la sauvegarde de Paris, les journaux prirent en main la cause des femmes indûment arrêtées, et, depuis ce temps, ces expéditions bien combinées qui nettoyaient nos boulevards et chassaient de la circulation ces quêteuses de vilenies, ont été à peu près abandonnées. Veut-on apprendre la fin de cette histoire et connaître le résultat de la polémique qui a paralysé les opérations du service actif ? Ce résultat est écrit en chiffres redoutables dans les registres du dispensaire : pendant l’année 1869, la moyenne des filles soumises malades a été d’une sur 116 ; celle des filles insoumises de 49 1/2 pour 100 ; cette proportion ne diminue pas ; loin de là : au mois de janvier 1870, sur 100 filles insoumises visitées, 61 étaient malades. Si l’on pouvait parcourir la correspondance des chefs de corps avec le préfet de police, on comprendrait la gravité du mal, l’un d’eux écrivait : « Nos hôpitaux regorgent et nos casernes sont désertes[1]. »

Une fille ne peut être inscrite avant sa majorité, à moins que les faits qui lui sont reprochés ne soient tellement nombreux, tellement graves, tellement coupables, qu’ils prouvent une corruption déterminée et éloignent toute possibilité d’amendement ; et encore, avant de se résoudre à cette extrémité, on fait auprès de sa famille toutes les démarches qui peuvent la mener au

  1. Pendant le troisième trimestre de 1865, les troupes de la garde impériale, casernées à Paris, ont eu près de 20 000 journées d’hôpital, pour cause de maladies provenant de débauches. (Dépêche du ministre de la guerre, en date du 15 janvier 1866)