Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/374

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les portières, les femmes de ménage, les balayeuses, les chiffonnières, les marchandes des quatre saisons. Celles qui, perverses et corrompues, n’ayant jamais aimé, ont trouvé moyen, pendant la période brillante de leur existence, de se faire écrire par leurs amants des lettres compromettantes, essayent de vendre celles-ci fort cher lorsque la pauvreté les saisit ; cette manœuvre, qui est extrêmement fréquente, c’est le chantage ; quelques unes de ces femmes y excellent et savent, en la pratiquant, se procurer des ressources aussi impures et plus coupables encore que celles dont elles ont subsisté jadis. Parfois elles s’adressent à des hommes récalcitrants, indignés de pareils procédés, qui, sans hésiter, vont les dénoncer à la préfecture de police ; celle-ci intervient alors, et il est rare qu’elle ne réussisse pas dans la mission officieuse dont elle s’est chargée. Les plus malheureuses d’entre elles, épuisées par l’alcoolisme et les maladies nerveuses, parvenues à ce degré de doux hébétement qui parait être la destinée dernière de ces cerveaux enfantins, sont reçues à la Salpêtrière, en hospitalité à Saint-Lazare, ou vont terminer leurs jours sur les grabats des dépôts de mendicité de Saint-Denis et de Villers-Cotterets.

La religion, dans la mesure des possibilités que la bienfaisance met à sa disposition, intervient pour les sauver, pour les arracher à l’horrible avenir qui leur est réservé, et les admet, quand elles sont jeunes encore, pleines de vie et d’ardeur, dans des refuges où elles peuvent renoncer à leurs désordres et suivre les voies que le repentir ouvre dans le calme des consciences apaisées. La première création de ces maisons hospitalières remonte haut dans notre histoire urbaine. Dès 1198, l’abbaye Saint-Antoine des Champs (aujourd’hui hôpital Saint-Antoine) reçoit des filles converties ; en 1226, saint Louis fonde le couvent des Filles-Dieu ;