Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/96

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Il y en a qui, vêtus en commissionnaires, restent toute une journée à regarder une fenêtre. Lorsqu’on a lu les rapports de la surveillance établie dans une rue de Paris pour s’assurer si Jud ne se rendait pas dans une maison signalée, on reste confondu que des hommes, bien plus, que des Français aient pu endurer un pareil supplice sans sécher sur place. Dernièrement, une des barrières les plus populeuses de Paris était trop visitée par des voleurs au poivrier, qui dévalisaient les ivrognes. Des agents se sont, le soir venu, embusqués dans l’ombre ; deux ou trois autres, étendus sur des bancs, ont feint de dormir. Il tombait une de ces petites pluies fines et serrées qui en vingt minutes ont trempé un homme des pieds à la tête. On était là depuis sept heures du soir. À minuit, nul incident ne s’était produit ; personne n’avait déserté son poste ; vers deux heures du matin, une bande de filous vint à passer ; quelques-uns s’approchèrent des faux poivriers, et commençaient déjà à faire le barbot, lorsqu’on se jeta dessus ; on en arrêta dix-sept ; la capture en valait la peine.

La persistance dont ils font preuve est égale à leur patience. Qu’un couteau soit trouvé sur le lieu où un crime a été commis, ils iront, sans se décourager, frappant de porte en porte chez tous les couteliers de Paris, afin de savoir quel est celui d’entre eux qui a vendu ce couteau et à qui il l’a vendu. Canler raconte dans ses Mémoires qu’un chiffon de papier sur lequel les quatre mots : deux livres de beurre, étaient écrits, le mit sur la trace d’un voleur dangereux, qu’il put arrêter. La vue d’un objet oublié par les malfaiteurs leur fait parfois deviner immédiatement à qui il appartient. Lors du fameux vol des médailles de la Bibliothèque royale, dans lequel se trouva compromise une certaine vicomtesse qui allait parfois faire des visites au préfet de police, il suffit aux agents de la sûreté d’examiner la scie, la lan-