Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/10

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mauvaises institutions : c’est l’usage. La place du Châtelet était encombrée par les meubles des pauvres diables qui n’avaient pu remplir les engagements consentis dans un jour de nécessité ; ceux-là étaient les plus heureux ; les autres, débiteurs insolvables, jetés pêle-mêle avec les malfaiteurs dans des geôles infectes, avaient le loisir de méditer sur les inconvénients que faisait naître l’absence de toute réglementation en pareille matière. On attendit bien des années avant de prendre un parti radical à cet égard ; il fallut l’avènement de Louis XVI et toutes les espérances qu’il fit éclore pour qu’on se permît d’arracher enfin le public aux oiseaux de proie qui le dévoraient. Le lieutenant général de police Lenoir, qui était plus à même que quiconque de savoir jusqu’où le mal s’étendait, voulant tuer l’usure, régulariser le prêt sur gage, en rendre les conditions peu onéreuses, obtint l’établissement à Paris d’un Mont-de-Piété analogue à ceux qui fonctionnaient déjà régulièrement dans les Flandres et dans l’Artois.

L’invention n’était pas nouvelle, et en ceci l’Italie nous avait donné l’exemple. Ce fut un moine récollet, Barnabé de Terni, qui, révolté des misères dont il avait été le témoin, et prêchant à Pérouse en 1462, émut ses auditeurs à tel point que ceux-ci réunirent immédiatement une somme importante qui devait servir de dotation à un établissement où l’on prêterait sur nantissement, à très-bas intérêt, et même, s’il se pouvait, gratuitement. Dans l’esprit de Barnabé de Terni, l’œuvre devait être avant tout charitable : aussi on l’appela Mont-de-Piété ; le nom est promptement devenu populaire et a prévalu. Les récollets s’emparèrent de la création d’un des leurs et s’en allèrent répétant qu’il fallait installer partout ces caisses de secours où les pauvres trouvaient, en échange d’un gage déposé, une