Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/167

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faire modeler une carte de France en relief par les sourds-muets eux-mêmes ? Quelques tombereaux de terre glaise suffiraient, et l’on obtiendrait ainsi un double résultat qu’il est bon de signaler. Ce serait d’abord pour les élèves un exercice excellent qui développerait leur adresse, exciterait leur émulation et leur donnerait des notions positives sur la configuration de notre pays ; ensuite, ce travail, une fois terminé, attirerait l’attention du public et exciterait son intérêt en faveur d’une institution qui, après avoir joui pendant de longues années d’une réputation universelle, semble actuellement ne plus éveiller aucune curiosité et être atteinte d’une sorte de ruine morale qu’il est assez difficile de définir. Elle est comme délaissée ; on dirait qu’elle n’a plus de vitalité propre, et qu’elle ne subsiste qu’en vertu de l’impulsion reçue jadis.

Elle est la maison-mère, et elle n’a aucun rapport avec les quarante établissements qui abritent environ 1 500 sourds-muets en France, où les statistiques en constatent plus de 30 000. Les théories d’enseignement pratiquées dans ces différents instituts sont vagues et sans liens entre elles ; ici c’est la dactylologie qui prévaut, là c’est la mimique, ailleurs c’est l’articulation ; pourquoi ne pas former un corps de doctrines expérimentées, et ne pas mettre tous les professeurs en relation les uns avec les autres par un journal mensuel, afin que chacun pût formuler les améliorations dont ces pauvres enfants profiteraient ? C’est une école, et je n’y vois aucun livre spécial, pas même le dictionnaire indiqué, obligatoire, où la gravure, venant en aide à l’imprimerie, expliquerait le sens de tous les mots par la figuration de l’objet ou de l’action, comme cela existe en Angleterre. C’est un hospice où l’on reçoit des enfants que le lymphatisme et l’anémie épuisent ; il y a une salle de bains, il est vrai, mais comment expliquer que