Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/22

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se découvrir le moins possible, mais c’était là un moyen insuffisant et peu en rapport avec les circonstances.

Cependant le maire de Paris avait pris, dès le 12 septembre 1870, une mesure radicale. Il avait suspendu l’effet du décret du 12 août 1863, qui limite à 10 000 francs le maximum par engagement pour le bureau central, à 500 francs pour les bureaux auxiliaires, et il avait déclaré que le Mont-de-Piété, tant que la position anormale de la ville n’aurait pas pris fin, ne pourrait consentir d’avances s’élevant au delà de 50 francs[1]. Le public en fut quitte pour fractionner à l’infini les lots qu’il apportait à l’engagement, et le Mont-de-Piété ne s’en trouva pas beaucoup mieux ; on en a eu la preuve dans la diminution rapide de la réserve disponible déposée au Trésor. À la fin de juillet, cette réserve s’élevait au chiffre de 7 800 000 francs ; au 31 décembre, elle n’était plus que de 662 120 francs, et au 6 février 1871 elle ne représente plus qu’une somme misérable de 62 121 francs, qui, en temps ordinaire, ne suffirait pas aux besoins d’une seule journée. Le danger était imminent, le Mont-de-Piété allait être réduit peut-être à refuser tout engagement ; le gouvernement n’hésita pas, il lui fit remettre trois millions pris sur les fonds des caisses d’épargne, à titre d’avance pour six mois et à 5 pour 100 d’intérêt. C’était le salut. Du reste, à cette lamentable période de notre histoire urbaine, le Mont-de-Piété était désert ; il regorgeait de gages emmagasinés, mais le public ne s’y présentait plus. Le fait est constaté en ces termes dans le Compte administratif de l’exer-

  1. Cette mesure n’était qu’une imitation de celle qui avait été prise en 1814, dans des circonstances analogues : « Beaucoup de personnes mettaient leurs effets en gage au Mont-de-Piété, pensant qu’ils seraient moins exposés si Paris était livré au pillage. Pour empêcher que cela se prolongeât, on décida qu’on ne prêterait pas plus de 20 francs sur chaque article, quelle qu’en fut la valeur (février 1814 ; Journal d’un détenu anglais). — Voir Napoléon à l’île d’Elbe, par Amédée Pichot ; p. 355.