Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/263

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pauté. Frognall Dibdin, dans son Voyage en France en 1818, admire surtout la gerbe d’eau du Palais-Royal ; il a raison : de toutes les fontaines de Paris, c’est encore la plus agréable à voir et la plus logique.

Paris fut longtemps menacé d’une fontaine dont heureusement l’exécution a été abandonnée. On avait imaginé d’élever sur la place de la Bastille un éléphant en bronze haut de cinquante pieds et qui aurait jeté de l’eau avec sa trompe dans le bassin qui devait lui servir de soubassement ; je me rappelle avoir vu le modèle en plâtre autrefois : c’était hideux. Lorsqu’on démolit ce colosse informe pour faire place à la colonne de Juillet, il s’en échappa quelques milliers de rats qui y avaient élu domicile.

Les fontaines auxquelles le public peut puiser gratuitement à toute heure sont assez rares à Paris ; je n’en compte que 208 : 38 dans l’ancienne ville et 170 dans la zone annexée. C’est peu. Toutes sont disposées sur le même modèle ; ce sont des bornes-fontaines munies d’un robinet à repoussoir, c’est-à-dire d’un robinet qui se referme de lui-même dès que l’on cesse de tourner le bouton ; de cette sorte on empêche l’eau de couler inutilement et d’aller se perdre à l’égout, précaution indispensable avec l’insouciante population parisienne.

Pour laver les rues, jeter dans les ruisseaux un volume d’eau capable d’entraîner les ordures qui les encombrent ou la fange qui les empeste, il faut des fontaines nombreuses, multipliées le long des trottoirs, et dont la libre disposition appartienne aux cantonniers chargés de faire chaque matin la toilette de Paris. Autrefois, ces bouches d’écoulement étaient toutes des bornes-fontaines qui, pendant un temps déterminé, coulaient à gros bouillons. Elles étaient dressées sur la marge des trottoirs : il est vrai qu’elles éclabous-