livres, des instruments de musique, des matelas, des cadres dorés ; là le mouvement est plus actif, et l’on voit parfois apparaître sur la table de pauvres nippes qui exigeraient un prêt de charité ; le minimum est fixé à trois francs ; pour l’accorder il faudrait savoir ne pas regarder de trop près et les commissaires-priseurs ont des yeux que l’intérêt a rendus bien clairvoyants.
Il est un autre endroit dans l’administration où l’on contracte aussi des engagements ; c’est le cabinet du directeur, car le Mont-de-Piété est autorisé à faire des engagements secrets, afin de ménager certaines susceptibilités et de respecter des pudeurs trop promptes à s’effaroucher. Le fait en lui-même n’a rien de mystérieux, et il est entouré de toutes les garanties de loyauté que nous avons vu mettre en œuvre pour les engagements ordinaires. Bien des personnes ignorant le fonctionnement du Mont-de-Piété, ne sachant pas que la discrétion y est considérée comme un devoir professionnel, craignant, — on ne sait pourquoi, — que leur nom ne soit divulgué, redoutant peut-être surtout d’avoir à faire queue aux guichets, s’adressent directement au chef même de l’administration et lui confient le nantissement qu’elles veulent engager. L’article est envoyé à l’évaluation du commissaire-priseur, et tout se passe comme d’habitude ; seulement l’argent est remis de la main à la main, et le nom de l’emprunteur, inscrit sur un carnet spécial, gardé sous clef, n’est jamais connu que du directeur. Les gages sont parfois assez médiocres ; j’ai vu apprécier une robe de soie « secrète » sur laquelle on a prêté 60 francs. Il est difficile de dire à quelle catégorie appartiennent les gens qui agissent ainsi ; toutefois je puis affirmer qu’il n’existe pas une subdivision du monde parisien qui n’ait passé au Mont-de-Piété ; cela n’a rien de surprenant dans une société où l’envie de paraître est devenu le plus impérieux de tous les besoins. Puisque