Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/331

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agents de la préfecture de police prouvent que, si nous ne sommes pas un peuple vertueux, nous sommes du moins un peuple très-protégé contre les convoitises malfaisantes.

Plus la richesse de la nation s’est augmentée, plus cette protection, facilitée par les embellissements de Paris, est devenue efficace, plus nous avons pu employer d’argent à défendre la collectivité contre les mauvais instincts de l’individu. Sous cette forme, le luxe tant vitupéré a servi aux intérêts généraux. Est-ce à dire, pour cela, que notre état social soit impeccable ? Non pas ; mais il est supérieur à celui que nous offre le passé. Parfois cependant on tire des conséquences outrées d’un fait anormal. Dans l’assassinat de la duchesse de Choiseul-Praslin par son mari, l’on a voulu voir une preuve de la démoralisation de la haute société parisienne ; un accident monstrueux n’implique nullement une dépravation générale ; il y aura toujours des comtes de Horn, des chevaliers et des abbés de Cange, des marquises de Brinvilliers ; il y aura toujours des individualités profondément perverses, comme il y aura toujours des chiens enragés.

Faut-il conclure de tout ceci que notre époque est enviable et que nous sommes d’un temps supérieur à nul autre ? Cette pensée n’est pas la mienne, et notre histoire a traversé des phases glorieuses et apaisées pendant lesquelles il semble qu’il eût été doux de vivre. La prospérité s’est éloignée de nous, de pesantes infortunes nous ont accablés ; nous devons aux autres et à nous-mêmes des malheurs que le temps seul et beaucoup de sagesse pourront réparer. Paris, échappé aux étreintes d’un adversaire sans merci, a essayé de se suicider, et nous avons subi des jours qui ont laissé dans nos cœurs un intolérable souvenir.

Ces jours d’angoisse et de deuil, nos pères ne les ont