Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/350

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dans la population ordinaire de Paris[1]. Il n’est pas surprenant, d’après cela, que le Parisien ne se mêle qu’avec une extrême réserve à des commotions qui sont contraires à ses mœurs, à ses habitudes et à ses intérêts ; chaque révolution se solde par une perte sèche de plusieurs centaines de millions, dont le Parisien paye la plus lourde part, lui qui fait surtout le négoce des objets de luxe et qui fournit les éléments les plus recherchés aux manifestations extérieures de la prospérité générale ; il le sait, ne s’en cache guère, maudit les bouleversements que l’on vient faire chez lui, les accepte par cas de force majeure, et ne désire rien tant qu’un gouvernement stable, assurant la tranquillité publique, permettant à chacun de vivre de son travail et de s’amuser en paix. Dans les révolutions, dans les événements qui les suivent, le vrai Parisien succombe sous la masse provinciale dont il est environné ; il succombe d’autant mieux qu’il n’essaye pas même de lutter et qu’il se contente de lever les bras au ciel en disant : « Qu’allons-nous devenir ? »

Michelet établit très-nettement, après la journée des Barricades et au moment de la fuite forcée de Henri III, qu’à Paris il n’y avait pas un tiers du peuple pour la Ligue. » Ce fait vrai s’est indéfiniment reproduit. Les mémoires, les journaux que les bourgeois de Paris nous ont laissés sur les époques de troubles qu’ils ont eu à traverser, ne sont qu’une série de lamentations où

  1. Le total des arrestations opérées par les soins de la préfecture de police en 1873, pour crimes ou délits, fournit des renseignements sérieux et ramène aux mêmes proportions ; total des individus arrêtés : 33 485, dont 2 418 étrangers, 21 733 provinciaux, 9 334 nés dans le département de la Seine. Dans ce dernier chiffre, il faut compter 2 415 enfants âgés de moins de seize ans qui ont été arrêtés plusieurs fois pour vagabondage et sont, presque tous, de réels Parisiens. La population indigente de Paris, celle qui a recours à l’Assistance publique, recensée en 1874, donne un total de 113 733 personnes. La proportion des Parisiens est de 21,82 pour 100 ; celle des provinciaux et des étrangers dépasse 76. Voir tome IV, chap. xix ; Appendice.