Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/377

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Nulle idée politique, nulle recherche d’amélioration ne les guide ; ils sont au mal et à la violence. La plupart sont des malades, il faut le reconnaître : intelligence embryonnaire, ignorance inqualifiable, corps ravagé, prédominance des instincts brutaux, paresse invincible, indifférence morbide ; ils représentent assez bien une sorte de choléra social qui éclate parfois sous l’empire de certaines occurrences exceptionnelles, mais qui fermente toujours à l’état latent.

Ceux-là sont constamment disposés à toute action, pourvu qu’elle soit mauvaise. Lorsqu’ils se jettent dans un combat, celui-ci devient immédiatement cruel et sans merci. Ils sont des bras redoutables, lorsqu’une tête envieuse et méchante les dirige. On s’en aperçut pendant la Commune. Ces hommes ont entrevu là, à travers la lueur des incendies, une sorte d’Éden grossier où les fleuves d’absinthe et de vin coulaient à vannes ouvertes, où la ruine universelle allait les faire les égaux des plus riches, ou tout fuyait devant leur force, qui n’était que l’horreur inspirée par la férocité de leurs actes. Ce sont eux qui ont versé l’huile de pétrole et qui ont assassiné les otages. Ils n’ont point oublié ces jours de bombance ensanglantée, ils y pensent, ils y rêvent ; et, si l’on n’y veille, ils essayeront de reconquérir ce paradis perdu, qui restera, dans leur souvenir, une légende à jamais regrettée.

Entre ces deux groupes si dissemblables, je placerai le troisième, qui leur sert d’intermédiaire, car il cherche à ébranler la sagesse du premier, et il n’hésite pas à utiliser la bestialité du second. C’est là que l’on trouve le personnel des grévistes quand même, les apôtres de la libre pensée, à laquelle ils ne comprennent rien, sinon qu’elle parait en contradiction avec les idées respectées ; c’est de là que sortent les ouvriers qui prolongent « le lundi » jusqu’à la fin de la semaine ; c’est là