Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/381

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versement de la colonne élevée à nos gloires, « le maître-peintre d’Ornans » s’est sans doute souvenu que son ami Proudhon avait écrit cette balourdise extraordinaire : « L’obélisque de Louqsor tout placé revient à quatre francs la livre[1]. »

La semence jetée par ces fauteurs de violences, au milieu des ouvriers mauvais, n’a point été emportée au vent ; elle a germé, mais elle n’a point encore produit les fruits qu’ils espéraient. Du nombre des idées confuses, des projets contradictoires, des rêvasseries utopiques, dont on a fatigué la tête de ces pauvres gens, il se dégage, non pas un corps de doctrines, mais un ensemble de desseins qu’il est bon de résumer, car ils forment ce que l’on pourrait appeler les « vœux des nouvelles couches sociales ».

On veut faire de l’État une sorte d’administrateur général et déposséder les patrons de l’industrie au bénéfice des associations ouvrières. Pour parvenir à ce but, on attribue à l’État les chemins de fer, les canaux, la Banque de France, toutes les grandes institutions de crédit, toutes les compagnies d’assurances ; les propriétaires et les actionnaires seraient désintéressés par des coupons de rente à trois pour cent au pair ; si cette « opération » réussissait, on se promet d’abolir l’impôt sur les boissons, sur le sel, les octrois et les douanes ; on dégrèverait la terre, on frapperait le revenu d’un impôt progressif, on supprimerait le budget des cultes ; l’armée serait dissoute et remplacée par la garde nationale soldée.

Ce n’est pas tout, et dans le projet de « l’État père de famille », on en fait un fabricant[2]. Le revenu con-

  1. Voir Correspondance de Proudhon, tome I, p. 115-120.
  2. C’est une vieille idée qui depuis longtemps hante les cervelles révolutionnaires ; la Société démocratique française tenant séance à Londres proposa le 19 novembre 1839, et fit adopter, le 14 septembre 1840, la