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THÉOPHILE GAUTIER.

Jean de La Taille, sur Robert Garnier, dont il aimait à citer un vers emprunté à la Bradamante :

Roulant mes libres jours en libre pauvreté,


et principalement sur Montchrétien, qu’il admirait en le plaignant de l’oubli immérité où ses œuvres sont ensevelies. La vie de l’homme le stimulait ; il eût voulu l’écrire, car il y eût trouvé matière à la reconstitution de ces mœurs hardies du xvie siècle qui lui plaisaient entre toutes.

Il avait apprécié le poète tragique ; les vers des Lécènes ne l’avaient point laissé indifférent ; l’Écossaise l’étonnait par la hardiesse de l’auteur, qui dix-huit ans après l’exécution du 18 février 1587 ose mettre au théâtre la mort de Marie Stuart ; Aman l’intéressait, peut-être à cause des emprunts que Racine y avait faits pour Esther, avec peu de discrétion et jusqu’à y copier textuellement un vers :

L’insolent devant moi ne se courba jamais.

Cependant ce qui l’attirait le plus vivement vers Montchrétien, c’était l’aventurier, l’assassin, le fugitif, le chef de bande qui devait mourir, au bourg des Tourailles, à l’âge de quarante-six ans, tué à coups de hallebarde et de mousquet par le seigneur Claude Turgot, un des ancêtres du ministre trop éphémère de Louis XVI. Gautier se promettait quelque plaisir et éprouvait quelque fierté à démontrer, pièces en main, que le sieur Antoine Mont-