Page:Du Flot - Les mœurs du tigre, récit de chasse, 1886.djvu/13

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de pénétration. Au centre, en effet, se trouvait une pagode en ruine consacrée à Dourgâ, l’une des sept âmes de Kâli. Aussi n’eût-on jamais pu déterminer un Hindou de basse caste à en franchir seul la lisière. Maintenant que le kala-bâgh y avait pénétré, tous mes gens étaient d’accord pour assurer que ce tigre était venu là pour déposer sa forme dans le temple, et qu’au lieu du monstre nous allions rencontrer la déesse elle-même, prête à nous dévorer. — Seul, Dandari, sans être un esprit fort, se rassurait en disant que nous allions combattre l’animal, et non la divinité.

À une heure, nous n’avions rien découvert. Les herbes étaient si hautes que les éléphants y disparaissaient, et que les têtes des bambous et des cannes venaient fouetter les caisses des howdahs.

Je dirai par la suite ce qu’il faut penser des récits de chasseurs pour rire qui racontent d’épiques combats entre les tigres et les éléphants. En la circonstance, ceux que montaient mes compagnons étaient des bêtes de choix, hautes de douze pieds, vieillies par l’expérience et tout à fait au courant des procédés de la chasse. C’étaient tous des mâles, absolument accoutumés à la voix de leurs mahouts (cornacs) et incapables de broncher en cas de surprise. Steadman m’avait recommandé de placer mon cheval entre deux d’entre eux, afin d’être à l’abri d’une attaque inopinée.