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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/11

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LE POUSSEUR DE LA DOURDU


— Votre fille le sait bien, dit le conseiller en se retirant.

Le jour même le père d’Igilt l’informa que son union avec le prince Ivor ne pourrait avoir lieu à moins que sa corbeille de noces ne fût, de son chef, garnie de mille doublons d’or. À ces mots, Igilt poussa un cri terrible qui fit frémir le pauvre vieillard.

— Implore l’assistance du ciel, ma fille, murmura-t-il : lui seul peut…

— Me procurer de l’or peut-être ! s’écria Igilt dont les yeux lançaient des éclairs. Non, non ; mais je sais qui m’en donnera !

Et la malheureuse s’éloigna pleine de fureur, laissant son père atterré. Elle croyait savoir en effet où se trouvait l’or qu’on lui avait demandé. Combien de fois, quand la tempête soulevait les vagues et entr’ouvrait le sein de la mer, n’avait-elle pas cru voir briller au fond les doublons nombreux semés sur le sable comme les étoiles sur le firmament ! Igilt, la brune fille de la grève, jouait avec les lames comme le poisson rapide, ou se balançait sur leur cime, comme les mouettes légères. Elle ne craignait rien de la fureur des flots, et avec le secours du fantôme qui gardait le trésor et qu’elle saurait se rendre favorable, ces richesses lui seraient acquises ; car, plutôt que d’y renoncer, elle préférait mourir. Pauvre insensée, qui, comme tous les cœurs avides, ne voulait point apercevoir l’abîme que sa soif d’un bonheur immérité allait ouvrir pour elle !

Le soir même, on eût pu la voir, debout sur son