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LES POIRES D’OR


temps de le soigner ; et je puis bien te le dire entre nous, il avale.... il avale les futurs gendres les uns après les autres, si bien que Fleur-du-Kranou s’étiole et court grand risque de rester fille.

— C’est ce que nous verrons, dit le malin sonneur, et je vous prie de m’ouvrir, s’il vous plaît.

— Comme tu voudras, mon garçon : entre donc, lui dit la petite vieille, en ouvrant la barrière. Et Claudik entra, toujours avec l’énorme main dans son sac. La vieille, curieuse comme toutes les portières, lui demanda ce qu’il portait ainsi sur le dos. Le rusé répondit que c’étaient des remèdes, un biniou et un beau justin brodé qui serait pour elle, s’il revenait sain et sauf de son expédition.

La vieille attendrie lui dit alors tout bas :

— Écoute, mon joli sonneur, quand tu arriveras au défilé des grands rochers, tu verras une belle avenue, et à côté un sentier étroit, plein de ronces et de pierres. Prends ce sentier, tu t’en trouveras bien. Il te conduira derrière le manoir. Alors joue en douceur un petit jabadao à la mode de Guingamp. La princesse qui aime la danse et les jolis garçons, arrivera tout de suite. Tu lui feras faire un tour de gavotte, et tes affaires n’en iront pas plus mal.

Là-dessus elle rentra dans sa hutte et laissa Claudik libre de s’avancer dans la forêt qui devenait de plus en plus sombre. Il passa tout près de grands précipices où coulaient des torrents qui avaient l’air de lui crier : Gare ! gare !! Puis le vent, qui pleurait dans les sapins, lui disait : Qui passe, trépasse !....