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LE RECTEUR DE L’ÎLE DE HOUAT


de la fabrique de la paroisse ; et le percepteur, le syndic, le maire, etc., c’était, nous l’avons dit, le seul et unique recteur, M. Pol Tanguy, que l’on n’appelait le plus souvent que M. Tang.

Quel brave et digne homme ! Alerte et joyeux, malgré ses soixante ans ; maigre comme un cénobite, mais dispos et encore plein de force et d’ardeur pour faire le bien. Ah ! si vous l’eussiez vu, par un jour de gros temps, courir sur le bord de la mer pour inspecter toutes les barques au mouillage dans les anses ou à l’abri de la jetée assez peu solide que les habitants avaient construite sous la direction de leur recteur ; puis, vérifier les bosses ou amarres des chaloupes ; examiner l’état des flots et du ciel ; consulter la force du vent et sonder, de son regard perçant, tous les coins de l’horizon, afin de s’assurer que pas un navire ne se trouvait en détresse.

Pauvre M. Pol ! si riche de dévouement et de charité. C’était presque pitié de le voir si vieux, si pâle et si maigre, vêtu d’une vieille houppelande râpée, que l’on ne pouvait guère, sans altérer la vérité, décorer du nom de soutane, et dont les pans, toujours déchirés, flottaient au gré des rafales. Quelquefois même, dans sa marche précipitée sur les falaises, le bon recteur laissait aux pointes des rochers des débris de son pauvre costume. De chapeau, il n’avait point. À quoi bon du reste pour affronter l’ouragan ? Et en vérité, si un tricorne n’est pas tout à fait inutile, il faut avouer qu’il est difficile de le maintenir en place quand il vente à déraciner les récifs. Je ne voudrais même pas