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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/157

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LE RECTEUR DE L’ÎLE DE HOUAT


— C’est lui, dirent-ils, c’est Corfmat : il est sans doute en dérive ; n’ouvrez pas, n’ouvrez pas !

— Que voulez-vous à cette heure ? reprit le prêtre en s’adressant à celui qui frappait, vous savez que la cambuse est fermée ; allez vous reposer et retirez-vous en paix.

— Mille tonnerres ! s’écria le visiteur, je veux boire un coup avec les amis pour renouveler connaissance… Ouvrez ou j’enfonce.

Et l’exécution suivant de près la menace, Corfmat se mit à frapper à coups redoublés.

— Il vaut mieux le laisser entrer, dit M. Tanguy en tirant les verrous, je vais essayer de le raisonner si cela est possible.

En apercevant le respectable vieillard qui se présentait devant lui d’un air calme et rempli de dignité, Corfmat, malgré son audace, se sentit singulièrement troublé ; mais l’eau-de-vie qu’il avait déjà bue à bord de sa chaloupe lui montant bientôt à la tête, il reprit son assurance et entra dans la cambuse en se dandinant comme une barque qui éprouve du roulis.

— On ne savait pas que c’était vous, recteur, dit-il assez sournoisement ; au surplus, il n’y a pas de mal, je pense, puisqu’il y en a d’autres ici, ajouta-t-il en regardant de travers les deux compagnons du curé.

Alors il fit un demi-tour devant la cheminée et alla, pour ainsi dire, tomber sur un banc adossé à la muraille ; puis, comme les autres marins, au lieu d’accueillir le nouveau venu en qualité d’ancienne connaissance, se détournaient et semblaient vouloir causer à