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FANTÔMES BRETONS


qui examinait avec une attention pleine d’anxiété… Dieu du ciel ! c’est la petite embarcation de…

— De Christophe, pas vrai, garçon. Je t’ai compris… Pas besoin de rester ici voir. Gagnons vitement nos hamacs.

Franz retint le matelot par sa vareuse. La lune jeta ses rayons obliques sur la chaussée de brisants. La voile avait disparu.

— Est-ce que j’ai la berlue, dit le matelot, ou bien sont-ils cachés par une roche, ou avalés par les congres ?

Pour toute réponse, Franz se mit à courir vers la baie où s’amarrait leur bateau. Tom le suivit en maugréant… Puis, au bout de cinq minutes, cinq siècles pour l’ardent sauveteur, la barque, sa voile hissée, au risque de rompre le mât, filait, comme un goëland sous la tourmente, vers les brisants que l’on prenait toujours tant de soin d’éviter. Mais Franz tenait la barre et le matelot ne pouvait que surveiller l’écoute, en recommandant son âme à Dieu.

— Pas moins, murmurait-il, que ça serait dur d’avaler sa gaffe pour ce damné de Brionel… !

Bientôt, à la morne clarté d’une lune voilée, ils virent l’eau bouillonner sur la chaussée, presque sous l’avant de leur bateau et aperçurent avec effroi la quille luisante, au-dessus des lames, d’un canot submergé. Soudain, sur la grosse roche que les houles commençaient à balayer, ils virent une ombre s’agiter, tendre les bras, et entendirent des cris de détresse. C’était la voix d’un enfant qui appelait au secours.