Aller au contenu

Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/220

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

224
FANTÔMES BRETONS


assemblée s’y trouvait réunie par les soins de Katel qui avait d’avance envoyé des messages, afin d’avoir plus de témoins de son nouveau triomphe. Elle se montra d’abord plus calme que de coutume. Doucement appuyée sur le bras de son fiancé, elle daignait lui accorder un peu de répit en faisant quelques tours avec d’autres. Puis, au milieu de la fête, il y eut un festin magnifique. Les liqueurs coulèrent en abondance ; et, sur le soir, on alluma des torches tout autour de la place, sous les grands arbres. Alors le bal de recommencer : gavotte, jabadao, ronde, courante et passe-pied, tout se succédait sans trêve ni repos…

— Encore, encore, s’écriait Katel radieuse, en dansant avec Salaün ; serais-tu las par hasard ?

— Non, non, jamais auprès de toi, disait le jeune homme fasciné.

Et le couple charmant glissait plus rapide au milieu des autres danseurs qui s’arrêtaient pour les regarder… Pourtant Katel s’aperçut bientôt que son cavalier faiblissait.

— Courage, lui dit-elle : encore quelques tours et Katel est à toi !

L’insensé, quoique à bout de forces, s’élança de nouveau dans le tourbillon qui l’emportait malgré lui. Enfin, ses pieds s’appesantirent, sa respiration devint pénible, saccadée, puis haletante comme un râle.

— Grâce, grâce ! murmura-t-il. Ô Katel, ô ma mie… ne t’ai-je pas… gagnée ?

La cruelle l’abandonna quand elle entendit cette plainte, et le malheureux délaissé s’affaissa sur l’herbe