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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/232

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FANTÔMES BRETONS


porte, pour moi du moins, si mon père est sauvé ?.... Et vous, ne savez-vous pas nager ?

— Oui, mais toi… Ô mon Dieu ! que faire ?

— Allez toujours ! lorsque le fanal sera placé sur la roche, il sera temps de revenir.

Et ils continuèrent leur course, guidés bien plus par leur instinct, par leur habitude des grèves, que par la clarté vacillante du fanal dont la pluie ternissait les vitres. Bientôt même ce fut Marguerite qui prit les devants. — « Ici, par ici, Monsieur Abel, disait-elle au jeune homme incertain : posez le pied sans crainte, à gauche, la pierre est solide ; sautez vite avant cette lame qui vient.... » Enfin ils atteignirent le rocher. Abel voulait y monter seul, à cause de la violence du vent ; Marguerite le supplia de la laisser faire, disant que son père aurait peut-être la chance de la reconnaître à la clarté du fanal. Ils gravirent ensemble l’écueil ébranlé par les houles devenues plus furieuses depuis que le flot se faisait sentir. Alors la fille du pêcheur saisit la lanterne, l’éleva au-dessus de sa tête et l’abaissa par trois fois. Oh ! bonheur !! sur le navire, balancé par les lames au point de disparaître de temps en temps, une lueur apparut, montant et descendant comme celle de Marguerite. Le capitaine du lougre avait évidemment aperçu le signal et y répondait de la même manière. La petite fille, à genoux sur le rocher, pleurait à chaudes larmes. Abel fixait le fanal dans une fente de la pierre.

— Partons maintenant, dit-il, le temps presse.

Ils redescendirent sur la chaussée et s’y engagèrent