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LA CHAPELLE DE COAT-AR-ROCH


Cependant l’impitoyable marchand de fil se garda bien de reconnaître la main de Dieu dans l’événement qui venait de se passer. Il ne s’en montra même que plus ardent à exécuter son affreux dessein. Il manda aussitôt des vagabonds de Morlaix, et leur promit un salaire en rapport avec la tâche odieuse qu’il leur imposait.

La profanation fut bientôt consommée : la chapelle de Coat-ar-Roch n’existait plus. On avait enlevé les meilleurs matériaux pour les vendre à la ville. De tristes ruines gisaient à la place du sanctuaire vénéré, et le paysan breton faisait le signe de la croix en passant, priait et détournait les yeux.

Mais, par un reste de respect, né de ce vague sentiment qui surnage au fond des plus mauvais cœurs, et par une désobéissance formelle aux volontés du maître impie, les ouvriers (touchés sans doute par les larmes de Brigitte) laissèrent subsister un pan de muraille avec la niche où l’on voyait la statue de saint Roch. C’eût été, du moins, une consolation pour la pieuse fille : elle ne devait pas en jouir longtemps.

Dès que le marchand de fil eut remarqué cette infraction à ses ordres, il ne put contenir sa colère et jura de faire disparaître les derniers vestiges de la protection que saint Roch, depuis un temps immémorial, avait accordée à la paroisse de Komanna.

Un soir donc, par un temps sombre, bien conforme à ses sinistres projets, Falloc’h résolut de les mettre à exécution sans plus différer. Pourtant, comme sa