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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/57

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UNE CHAISE EN ENFER


misérable que le cidre couche sur le chemin. On rit et l’on passe, mais on ne s’en préoccupe pas davantage, tant ces scènes sont communes au retour des pardons. Eh bien ! On me permettra de le dire : mieux vaut l’ivresse du cidre que celle des mauvais écrits ! Mieux vaut un paysan ivre qu’esprit fort ! Mieux vaut pour lui la lie du vin que celle qui se trouve au fond de beaucoup de livres !

Mais nous voilà bien loin de la Chaise en enfer, et cette digression ne s’est présentée sous notre plume qu’au souvenir du pauvre cabaret, où l’histoire de Griffard, le buveur de cidre, me fut racontée.

Un soir donc que l’excursion de la journée avait été plus longue que je ne l’avais prévu, j’entrai dans la triste auberge que l’on voit au bord de la route, près d’un pont jeté sur un joli ruisseau, affluent de l’Ellée (dans la commune du Saint, entre Le Faouet et Gourin.)

Là, je m’étais à peine assis auprès du feu, qu’un vieux charpentier de Guiscriff, — comme je l’appris dans la soirée, — vint aussi s’asseoir et réclamer sa chopine de cidre pour deux pauvres sous… que je payai généreusement.

C’était bien peu ; pourtant cela suffit pour obtenir du vieux conteur le récit suivant. À vous, lecteur, de juger s’il vaut deux sous.


II

Oui, mes enfants, la chaise de Griffard avait été faite en enfer avant sa naissance ; mais Satan, comme on